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Philosophie de la raison
16/04/06 - corrigé/modifié le 18/08/07

L'« ouverture d'esprit » 1

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L'«ouverture d'esprit»; élargissement du champ de compréhension ou conformisme aux nouveaux comportements mentaux? Pour une véritable ouverture d'esprit...

L'agitation sociale sur fond de remise en cause de l'autorité, en ce début d'année 2006, avait donné matière à de nombreux débats; entre autres à propos de l'enseignement. Au cours de ceux-ci j'avais pu lire et entendre de la part de certaines personnalités politiques qu'un des objectifs de l'enseignement était l'«ouverture d'esprit».
Cette notion «d'ouverture d'esprit» entendue/lue ici comme souvent auparavant, et postulée comme essentielle, m'avais toujours gêné sans que je sache pourquoi.
J'ai donc commencé par me demander ce que cela pouvait vraiment signifier.
Cela pourrait à priori vouloir dire «élargissement du champs de compréhension». Mais le sens d'usage est ambigu; après réflexion il me parait que la signification est entre autres mais essentiellement, « avoir la capacité d'accepter un certain nombre de choses par « humanité »». Sorte de tolérance maximum. Réaction également contre l'ancien monde reposant sur l'autoritarisme, la sévérité qui nous paraissait souvent arbitraire.
Or, l'extrême tolérance des « choses» dites « humaines » va à l'encontre de l'esprit critique et de la capacité de jugement indissociables de la recherche de la compréhension sans idée préconçue. Car les émotions et les sentiments sont alors prépondérants, et on confondrait le fait de « comprendre », qui est indissociable de la recherche de l'objectivité et de l'analyse, avec celui de « compatir sentimentalement ». Il est vrai que l'on peut compatir également en comprenant les situations et les êtres, mais c'est bien souvent dans ce cas par analogie avec son propre vécu et/ou ses fonctionnements psychologiques propres -- donc de manière « projective », égocentrique --. Et l'« ouverture d'esprit » pourrait bien ici revenir à « plus de subjectivité ».
En fin de compte, chercher à faire valoir l' « ouverture d'esprit » pourrait bien revenir à consolider cette tendance amorcée il y a probablement longtemps; le rétrécissement de la capacité d'analyse et de la Raison, la Raison étant la chose spécifiquement (et uniquement) humaine, et qui permet précisément la compréhension des choses et des autres.

Par ailleurs un grand nombre de choses peuvent être considérées comme « humaines »; comme le fait de chercher à nuire à autrui, la haine, chercher à « paraître avoir raison » (au lieu de chercher à savoir si l'on a réellement raison), placer ses propres intérêts ou ceux de son groupe avant ceux de la collectivité et/ou de l'humanité etc. Ces côtés négatifs sont par définition « humains ». Nous pouvons les comprendre (cela ne dépend que de notre capacité de compréhension), nous pouvons compatir, et nous pouvons les posséder. Mais dans tous les cas nous ne devons pas les admettre sous prétexte que «c'est humain» !!.

La réaction contre le vieux monde autoritaire et borné nous amène donc apparemment la diminution de la Raison et le renforcement de la réceptivité aux idées reçues (conformisme à des « clichés » -« manières de voir et de sentir »-). Et de plus toute attitude réactive est dominée par les affects qui sont individuels, induits entre autre par le contexte, et qui peuvent s'émuler collectivement. La réaction n'est donc pas un comportement d'individu libre puisqu'elle est déterminée par ces éléments et qu'elle détermine les comportements et idées.

Au final, on doit s'efforcer de faire que l' « ouverture d'esprit » soit autre chose qu'une ouverture aux nouvelles idées reçues et une diminution de l'esprit critique; une véritable ouverture de la conscience, un élargissement de la raison… Et cela ne peut aboutir de toute manière qu'à un désintéressement personnel et donc à une véritable humanité, mais non « projective », non égocentrique.